ARTICLE : La slay

Drill, plug, hyperpop, rage, jersey… et si ça ne s’arrêtait pas la ?

Ces 5 dernières années, nous avons assisté à la montée en puissance d'une nouvelle scène dans le rap français, une nouvelle vague venue pour ramener de la fraîcheur et des nouvelles sonorités, et ce pour notre plus grand bonheur. Le rap mainstream devenu redondant et lassant pour les ¾ des artistes, c’est ce côté là du rap dit “underground” vers lequel notre intérêt se porte. Avec des artistes comme thaHomey, La Fève, 8ruki, Big B, Luther ou encore Femtogo qui cassent les codes que ce soit dans les flows, dans les visuels et dans les instru choisies, un vent de fraîcheur futuriste est venu nous bercer ces dernières années. Tous ces artistes, bien sûr inspirés par les américains, ont réussi tout de même à proposer quelque chose d’unique dans leur musique et à retranscrire une identité forte. Tout cela nous conforte dans l'idée que ces têtes émergentes de la scène français feront dans le futur des sons inspirés par un nouveau mouvement de l'underground anglophone, la slay.


Qu’est-ce que la slay ?

L'histoire de la slay commence en 2016 avec Kaine Carlson, un jeune canadien passionné de rap, de skate et de vêtements. Il crée une marque de vêtements appelé "Slayworld", puis il fonde un groupe de rap du même nom avec ses potes pour promouvoir sa marque. Ce sont donc par la suite des rappeurs et beatmakers comme Goonie, puis Summrs, Kankan, Autumn, Izaya Tiji, Sadbalmain et Eddie giannie qui ont rejoint ou qui gravitent autour du groupe, qui malheureusement a été dissout en 2020. Inspirés par toute la vague autour de Playboi Carti, ils réussissent à digérer toutes ces influences et à recracher quelque chose de novateur. En effet, durant ces 4 années ils ont balancé une multitude de sons avec des sonorités plug, plug'nb, rage mais avec une particularité dans les productions, des effets distordus dans les prods sont omniprésents, ainsi que des effets sur la voix très spéciaux qui viennent complexifier ce qui dégage du son : ce sont les caractéristiques du mouvement slay. La slay possède des similitudes avec la plug et la rage, mais émane une plus grande crudité tout en étant plus complexe, c'est ce qui a retenu notre attention aux premières écoutes de ce style. 


"Fendi" extrait du projet éponyme "Kankan"


La slay a par la suite connu une évolution avec des artistes comme comme Rollin Thrax, Destroy Lonely, Dom Corleo, Hardrock ou encore le collectif Trentbtw avec notamment Southside Silhouette pour les rappeurs, et Saint, Zodiac, 16Teen, Dizaie, Cxdy pour les beatmakers. Cette évolution marque la création d'un véritable mouvement qui vient repousser des limites qui, nous le pensions avec la plug la rage etc, étaient déjà dépassées. Les basses sont destructrices, et les effets de l'instrumental toujours aussi poussés dans la quête d'une complexité révélatrice. De plus, nous retrouvons ces productions souvent affiliées à d'autres genres comme la pop, l'électro, le jazz, le rock, l'hardrock ou même le métal. Cette fusion décuple l'énergie, et les sensations ressenties à l'écoute. 


"NO PAIN NO GAIN" extrait de "DIAFORA", Southsidesilhouette


L'une des forces de la slay réside dans le fait que l'ambiance peut différer malgré ses caractéristiques, ce qui n'est pas le cas de la plug par exemple. Les artistes posant dessus ne sont donc pas cantonnés à une énergie. 

Une écoute peut créer un véritable torrent d'énergie qui vient nous submerger, comme créer une bulle mystique qui nous berce vers notre nostalgie. La slay vient amplifier toutes ces émotions qui nous prennent au corps pour pouvoir les sublimer. 


"Luv Drunk" extrait de "2014", DomCorleo


Qu'en est-il en France ?

Pour autant avec la slay, il faut un temps d'adaptation comme pour chaque nouvelle merveille complexe que l'on découvre pour la première fois, cette raison explique la faible popularité en France de ce genre, le mainstream restant sur des codes très simples. Mais malgré une exposition de la slay très faible chez nous, il existe quand même un réel précurseur qui se distingue, nous parlons de l'avant gardiste Bitsu. Ayant collaboré avec Sadbalmain à de multiples reprises, son univers à première vue désordonné à la limite de l'incompréhension colle pafaitement avec la slay. Pour autant, son art est loin d'être le fruit du hasard, sa toile est sombre avec une teinte d'espoir illustrée par des visuels et des structures étrangement marquants. Son lien avec la slay est donc naturel, il laisse libre court à son inspiration dans l'expression codé de son art, et dégage une complexité en réalité folle de sens.

 

"Diamant" extrait de "Rêves" qui sortira en février 2023, Bitsu

 

D'autres artistes en France s'y sont essayés, on peut citer ThaHomey, Yung Nodjok, Teklam, Moji x Sboy, Zalmad, Azur... Mais encore très peu ont fait de ce style leur ligne directrice, mais nous pensons que ce ne serait tarder avec toutes les possibilités qu'offrent la slay. Ce sont peut être sur les rappeurs indépendants sur soundcloud que notre regard devrait se tourner, avec une scène qui émerge  de quelques rappeurs comme ihatemed ou Dara, ou encore plus localement Xury, 17abl et AimxX.



Ilias El Amri, le 27/12/2022
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Dara

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17abl

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Xury

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AimxX

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Ihatemed